J'ai commencé Au chateau d'Argol de Julien Gracq. Il s'agit de son premier roman je crois et je retrouve les sensations que j'avais eues en entendant la longue lecture du Rivage des Syrthes lors du marathon des mots, il y a 2 ans, encore enthousiasmé par mon arrivée à Toulouse et sur le chemin des vacances vers Mimizan (le voyage est important chez Gracq).
Voici donc un livre éthéré, qui coule vraiment, plus comme une rivière paisible que comme un robinet. Ou plutôt un lac, ici l'eau coule presque imperceptiblement , même l'écume des vagues est une bande blanche statique. Les personnages sont décrits jusque dans leurs actes, leur essence embrassant leurs sentiments ainsi décuplés, sublimés avant d'être rematérialisés dans une réalité si parfaitement cohérente avec un état d'esprit qu'elle est évidemment douteuse. Mais de doute il n'y a pas car c'est un idéal qui est décrit, un univers alternatif et dont le romantique est un fondement enfoui dans un temps étiré à la limite de la rupture (mais qui ne rompt pas). C'est sans doute là la vraie raison qu'a Albert de ne pas être plus intéressé que ça par les femmes avant d'avoir rencontré Heide, Heide qui est un paysage spirituel, disons un Eden miraculeusement retrouvé comme un souvenir nébuleux.
Je n'en suis pas bien loin dans ma lecture et j'espère que le drame qui s'annonce, avec terreur, sera à la hauteur de sa construction: calme, serein mais horrible dans sa quotidienneté et son inéluctabilité, comme la mort à la fin d'une maladie longue, à la fin non écrite mais suffisante de la neuvième symphonie de Bruckner.
Au chateau d'Argol n'est pas une carte et ne témoigne d'aucun mal, sans doute pas non plus d'un quelconque Bien: il s'agit du paysage de Montano dans sa sauvagerie. La référence littéraire est ici un buisson et une pierre, là l'éclat d'une lumière sur le mobilier, Heide qui sort de l'eau est une peinture de Vénus, immortelle déjà statufiée mais aussi photo jaunie d'une femme dans le déséquilibre d'un mouvement léger et gai et dont la maladresse est une séduction, incomplète et donc sexuellement plus intéressante, comme Pénélope surpasse Calypso pour Ulysse. Je ne connais pas encore la direction que prendra cette histoire, je sais qu'au moins une personne partira, comme Ulysse, encore, après qu'il ait retrouvé Pénélope, ne finit son voyage qu'en repartant vers un autre
Il s'agit d'un roman qui parle de la supériorité de la vie sur l'idée et qui, se faisant, n'oublie pas de dire le contraire. Après tout la vie est une idée, mais quel bonheur de l'avoir imaginée.
Un bon publicitaire parlerait de "moment Nutella", tout simplement.
Voici donc un livre éthéré, qui coule vraiment, plus comme une rivière paisible que comme un robinet. Ou plutôt un lac, ici l'eau coule presque imperceptiblement , même l'écume des vagues est une bande blanche statique. Les personnages sont décrits jusque dans leurs actes, leur essence embrassant leurs sentiments ainsi décuplés, sublimés avant d'être rematérialisés dans une réalité si parfaitement cohérente avec un état d'esprit qu'elle est évidemment douteuse. Mais de doute il n'y a pas car c'est un idéal qui est décrit, un univers alternatif et dont le romantique est un fondement enfoui dans un temps étiré à la limite de la rupture (mais qui ne rompt pas). C'est sans doute là la vraie raison qu'a Albert de ne pas être plus intéressé que ça par les femmes avant d'avoir rencontré Heide, Heide qui est un paysage spirituel, disons un Eden miraculeusement retrouvé comme un souvenir nébuleux.
Je n'en suis pas bien loin dans ma lecture et j'espère que le drame qui s'annonce, avec terreur, sera à la hauteur de sa construction: calme, serein mais horrible dans sa quotidienneté et son inéluctabilité, comme la mort à la fin d'une maladie longue, à la fin non écrite mais suffisante de la neuvième symphonie de Bruckner.
Au chateau d'Argol n'est pas une carte et ne témoigne d'aucun mal, sans doute pas non plus d'un quelconque Bien: il s'agit du paysage de Montano dans sa sauvagerie. La référence littéraire est ici un buisson et une pierre, là l'éclat d'une lumière sur le mobilier, Heide qui sort de l'eau est une peinture de Vénus, immortelle déjà statufiée mais aussi photo jaunie d'une femme dans le déséquilibre d'un mouvement léger et gai et dont la maladresse est une séduction, incomplète et donc sexuellement plus intéressante, comme Pénélope surpasse Calypso pour Ulysse. Je ne connais pas encore la direction que prendra cette histoire, je sais qu'au moins une personne partira, comme Ulysse, encore, après qu'il ait retrouvé Pénélope, ne finit son voyage qu'en repartant vers un autre
Il s'agit d'un roman qui parle de la supériorité de la vie sur l'idée et qui, se faisant, n'oublie pas de dire le contraire. Après tout la vie est une idée, mais quel bonheur de l'avoir imaginée.
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1 commentaire:
Je pourrais évidemment raconter l'histoire: un gars qui emménage dans un chateau, reçoit son pote qui vient avec une amie, celle-ci tombe sous le charme du héros... ou du chateau ; le reste est à l'avenant et est digne des feux de l'amour et ne tiendrait que sur une petite centaine d'épisodes, c'est dire s'il n'y a pas grand chose à en dire.
J'en suis aux deux tiers du bouquin. Encore une fois, au cas ou je ne serais pas clair, je serais très surpris d'être surpris par la fin: quelque part il ne peut pas y avoir de fin, si ce n'est dans un nouveau voyage d'un des personnages (je penche pour un simple départ de Heide avec le pote du héros, et que c'est parce qu'il n'y aura aucun drame attaché que celui-ci le trouvera tragique... une fin décevante pour certains).
Gracq n'écrit que des descriptions quelque part. Les dialogues et les actions des uns et des autres sont des paysages. Le temps ne semble pas passer mais je crois qu'on en est à une dizaine de jours dans l'histoire. Ca ne durera pas forcément beaucoup plus longtemps. Mais il faut comprendre que le temps est complètement écroulé sur lui-même, c'est l'inverse du temps de Proust (et non le contraire, je dis ça pour ceux qui se rappelleraient de certains cours de physique), c'est à dire que tout se retrouve dans le présent, y compris le passé, le futur, la culture et la tradution mais aussi, et c'est le plus intéressant, la durée. Après chacun peut sentir des choses différentes bien sûr sur cette écriture un peu particulière.
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